À quel point une œuvre doit-elle être complexe pour être de l’art?

Tout le monde le sait, des gribouillis d’un enfant de 2 ans avec des crayons de couleur, ce n’est pas de l’art ; mais personne ne saurait justifier comment identifier le minimum degré de complexité requis par une œuvre avant d’être reconnue comme de l’art par l’opinion publique. De façon plus globale, cet article met en exergue : (i) les différents minimums degré de complexité que toute pièce d’art a atteint ou excédé afin d’être extériorisée ; (ii) comment toute personne pourrait percevoir/identifier ces mesures pour chaque future pièce d’art qui serait présentée à elle ; (iii) et adresser la place de l’art AI et de l’art abstrait dans tout cela.

12/2/20249 min lire

1- Pourquoi définissons-nous la complexité ?

Une définition de 8 lignes pour définir l'art a été communiquée sur la page ci-après : Une phrase de 8 lignes pour définir l'art: | Éditions Flarne

Il a été essentiellement dit que l’art est l’expression d’un concept complexe.

Mais cette définition ne définit pas la complexité dans une assertion qui aiderait à déterminer, pour tout adulte, si une œuvre donnée est suffisamment complexe pour être considérée comme de l’art ou non.

2- Caractéristiques générales du mot « Complexité » :

Dans la définition de l’art reprise au point 1, il est indiqué qu’un concept étant un mélange de style et de substance, ce qui rend son expression complexe ne peut l’être que de 3 manières : stylistiquement complexe, thématiquement complexe, ou les deux.

La complexité que nous essayons de définir est bien celle de l’art, induite par une analyse de l’oeuvre présentée. L’art est une expression, un processus d’extériorisation de quelque chose. Le quelque chose final est l’œuvre d’art.

Nous voulons nous assurer que cette oeuvre final est issue d’un processus complexe à réaliser par l’adulte moyen.

Nous évaluons la complexité pour l'adulte moyen et non pour l'artiste, car la complexité subjective implique « simple » dans beaucoup trop d'occurrences. De plus, le terme « complexité subjective » rend l'existence du mot « complexité » complètement inutile.

3-Complexité thématique

Comment prouver qu'une exploration thématique est complexe ?

Une exploration thématique est un ensemble de connaissances philosophiques, donc sur la vie. Qui trouverait que des connaissances sur la vie humaine qui sont connues et surtout approuvés par la majeure partie des gens soient complexes ? Personne.

Ainsi, le degré de complexité d'une exploration thématique est évalué par la mesure dans laquelle cette exploration est susceptible de modifier, à long terme, les connaissances intellectuelles ou la position de l'adulte moyen sur ce sujet à la date de publication de l'œuvre.

Les explorations thématiques sont complexes lorsque, si elles sont convenablement transmises, elles sont susceptibles de modifier de manière significative la position ou la connaissance initiale sur un sujet donné de l'adulte moyen au moment de la publication de l’oeuvre.

Nous sommes instinctivement conscients de la position ou de la connaissance initiale de l'adulte moyen sur un sujet donné parce que nous, des personnes du 21e siècle, vivons dans un monde hautement connecté par Internet.

Nous sommes conscients que l'adulte moyen est au courant de ce que nous entendons par faire une bise ; et nous sommes également conscients que l'adulte moyen n'est pas au courant de ce que nous entendons par Big Data.

Mais cela ne concerne que notre période dans le temps.

Peut-être qu’à l’avenir, le terme « big data » deviendra un signal social aussi basique que le terme « faire une bise ».

Attention, ceci n’est guère de la théorie ; c’est un phénomène qui se produit.

Les personnes du 17e siècle (à l’instar de René Descartes dans son livre « Discours de la méthode ») ne savaient pas que les animaux avaient des capacités intellectuelles. Ils croyaient tous avec ferveur que les animaux étaient des êtres illogiques parce qu’ils ne pouvaient pas parler le langage humain.

Mais maintenant, au 21e siècle, les connaissances de l’adulte moyen sur ce sujet (que les animaux soient des êtres illogiques ou non) relèvent du bon sens pour tous.

Ce sujet est devenu un signal social de base. Prouver que les animaux ont des capacités intellectuelles aurait été un objectif complexe au 17e siècle ; mais au 21e siècle, c’est considérablement moins important.

Parce que les positions ou les connaissances initiales sur ce sujet de l’adulte moyen au moment de l’expression de cette opinion sont différentes.

Persister à évaluer le degré de complexité d’une exploration thématique à partir du prisme de votre position et de vos connaissances sur ce thème à l’époque actuelle est intrinsèquement erroné.

Une exploration thématique est suffisamment complexe – et donc légitime pour valider la catégorisation d’une œuvre d’art – lorsque vous vous imaginez vivant à l’époque où l’œuvre a été publiée, avec les mêmes croyances qu’eux, et que vous imaginez si l’expression de l’artiste vous aurait effectivement affecté.

Pas le vous actuel, mais le « vous » historique.

4-Complexité Stylistique (Excluant l’Art Abstrait)

Cette section ne prend pas en compte l’art abstrait pour des raisons qui seront exposées un peu plus loin dans l’article.

-Qu’est-ce que la complexité stylistique ?

Une œuvre d'art stylistiquement complexe est une œuvre d'art dont la substance conventionnelle n’est pas complexe (par exemple : pensez à un peintre qui dessine un chat souriant. La substance (conventionnelle) est un chat souriant et ce n’est pas un concept difficile à imaginer pour l’adulte moyen).

Nous disons substance conventionnelle, car dans certaines œuvres d’art, la substance que l’artiste essaie de transmettre est le style lui-même. (Par exemple : pensez à un écrivain créant une histoire où les personnages promeuvent un mouvement artistique, disons – le style minimaliste et ses bienfaits sur l’art –, et donc, la manière même dont l’histoire serait écrite (c’est-à-dire son style), serait une partie inextricable de la substance que l’écrivain cherche à communiquer).

Le terme substance conventionnelle nous permet de séparer le style, de la substance à laquelle nous faisons allusion ; même lorsque le style fait partie de la substance.

-Pouver la complexité stylistique dans une oeuvre d’art :

L'existence de la complexité stylistique est prouvée de la même manière pour tous les médiums existants.

Nous n'avons seulement besoin que l'œuvre présentée parvienne à valider un prérequis et une question-test.

Prérequis : L'œuvre exprime-t-elle un aspect lié à l'expérience humaine ?

Question-Test : Le degré d'immersion dans ledit aspect de l'expérience humaine, atteint par cette œuvre, peut-il être correctement atteint par l'adulte moyen du premier coup ?

Si ce n'est pas le cas, le produit final est alors complexe en conséquence car, si un objectif peut être correctement réalisé par n'importe qui du premier coup, il serait considéré comme simple à réaliser.

Dans le cas d'un dessin par exemple, effacer un dessin, même légèrement, et réessayer, c'est déjà une deuxième tentative.

Etant donné qu’il y a trop de personnes qui sont débutantes dans tous les médiums existants, nous prendrons l’option la plus sûre de précision et supposerons ce qui suit :

L'adulte moyen est un débutant dans tous les médiums.

Un exemple avec la danse.

Medium - Danse: Prouver la complexité stylistique d’une performance de danse

Question prérequise: La performance exprime-t-elle un aspect lié à l’expérience humaine ?

Dans ce cas, l’aspect lié à l’expérience humaine sont des mouvements corporels spécifiques transmettant divers sentiments et impressions qui peuvent être rappelés en nous, involontairement, par une autre performance grâce à une appréhension familière de ces sentiments et impressions.

Il est important de préciser que, bien que les sentiments évoqués soient difficiles à cerner avec des mots, nous pouvons toujours les appréhender à nouveau grâce à la remémoration involontaire provoquée par l’appréhension sensoriellle (comme l’observation) d’une autre performance ; et savoir qu’il s’agit de la même famille de sentiments et d’impressions lorsqu’ils arrivent ; ou au contraire, savoir que ce n’est pas eux.

Question-Test: Le degré d'immersion dans ledit aspect de l'expérience humaine, atteint par cette œuvre, peut-il être correctement atteint par l'adulte moyen du premier coup ?

En général, nous pouvons rapidement nous rendre compte, grâce à notre connaissance intuitive de la réalité, si atteindre ce degré d’immersion dans ces aspects de l’expérience humaine, au premier essai, semble trop difficile pour un débutant de ce médium.

Preuve.

Si une œuvre valide la question prérequise, cela signifie que l’œuvre exprime un aspect qui peut être connecté à l’expérience humaine ; et donc, l’adulte moyen peut toujours rencontrer dans sa vie l’aspect qui a été exprimé dans l’œuvre.

La Question-Test exige que nous ayons une idée de la façon dont les débutants opèrent dans le médium concerné. Et comme les médiums (dessin, théâtre, chant, instrument de musique, gastronomie, écriture, etc.) sont très populaires (et les médiums les moins populaires font un usage intensif des plus populaires), l’adulte moyen est quelqu’un qui a au moins été débutant dans chaque médium.

Par conséquent, la question test est également accessible à tout adulte essayant de prouver la complexité stylistique d’une œuvre.

En conclusion,

Parce que la question prérequise et la question-test sont toutes deux accessibles à l’adulte moyen, tout adulte essayant d’imaginer un débutant en train d’effectuer une performance artistique donnée n’a pas besoin de beaucoup de puissance imaginative avant de rencontrer mentalement les premières difficultés susceptibles d’être rencontrées en essayant d’atteindre un degré similaire d’immersion de cet aspect lié à l’expérience humaine (en raison de l’accessibilité de la question prérequise) pour un débutant dans ce médium spécifique (en raison de l’accessibilité de la question-test).

Dans le cas d’une performance de danse, dont l’aspect lié à l’expérience humaine qui a été exprimé était : « des mouvements corporels spécifiques transmettant divers sentiments et impressions », on a ce qui suit.

Question prérequise: La performance exprime-t-elle un aspect lié à l’expérience humaine ?

La question prérequise est validée puisque je peux voir des mouvements corporels partout dans ma vie ; et puisque tous les sentiments et impressions dont je suis conscient dans ma vie quotidienne peuvent toujours être rappelés à ma conscience par une remémoration involontaire.

Question-Test: Le degré d'immersion dans ledit aspect de l'expérience humaine, atteint par cette œuvre, peut-il être correctement atteint par l'adulte moyen du premier coup ?

Dans le cas d’une performance de danse, je me concentrerai sur l’aspect des mouvements corporels car il est plus aisé de le démontrer dans cet exemple (où nous ne sommes pas conscients des sentiments évoqués) :

- Coordination inhabituelle persistante demandée aux parties du corps ;

- Plusieurs séries inhabituelles de mouvements corporels ;

- Flexibilité demandée aux parties inhabituelles du corps, à des moments précis et de manière répétée.

Parce que l’adulte moyen est conscient de ces choses, car il a lui-même, à un moment de sa vie, essayé de danser, il peut imaginer, ayant été débutant lui-même, si ces choses seraient difficiles à réaliser pour un débutant du premier coup.

Conseils utiles: Étant donné que, parmi les aspects liés à l’expérience humaine, il y a toujours un contenu sensoriellement appréhensible (dans ce cas, les mouvements corporels), nous pouvons prouver la complexité stylistique simplement en nous concentrant sur la capacité du débutant à les reproduire.

C'est ainsi que l'on prouve la complexité stylistique d'une œuvre et que l'on la valide en tant qu'œuvre d'art.

5- A propos de l’art AI :

Si je pouvais appuyer sur un bouton et qu’un beau dessin apparaisse comme par magie, je ne serais pas un artiste, mais le résultat serait de l’art car l’effort historique pour arriver à cette image, avec les matériaux utilisés par le ou les artistes initiaux, serait stylistiquement complexe pour la personne moyenne. Donc l’art AI, c’est bien de l’art.

6- A propos de l’Art Abstrait :

Comment un adulte moyen peut-il évaluer la compétence technique de chaque œuvre d'art abstrait ? Il ne le peut pas.

Comme vous l’aurez peut-être remarqué, l’art abstrait, par sa nature même, sa définition, ne valide pas la Question Prérequise.

Contrairement à d'autres formes d'art, il n'existe pas de mesure que nous puissions appliquer de manière répétée afin d’évaluer la complexité de l'exécution de chaque oeuvre d’art abstrait... en raison de son détachement absolu des références à la réalité.

Ainsi, il n'existe pas d'élément discernable et répétable de l'art abstrait en général, qui puisse universellement permettre à l’adulte moyen d'évaluer ce qui est complexe et ce qui ne l'est pas dans une œuvre d'art abstraite donnée.

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Mais, à part l'art abstrait, chaque pièce d’art (dans le sens de la définition vu au point 1 – "l’Art Personnel") est objectivement complexe (c’est-à-dire, complexe aux yeux de l’adulte moyen). Soit thématiquement, soit stylistiquement, soit les deux.

Les trois formes d'art :

A- Stylistiquement complexe (l’Art SC) + Thématiquement simple – cela concerne beaucoup de musiciens et de peintres.

B- Thématiquement complexe (TC Art : ce qui conduit naturellement à une complexité stylistique en conséquence) – comme un professeur de physique. beaucoup d'écrivains.

C- Stylistiquement complexe + Thématiquement complexe (TC Art encore une fois) – les types les plus rares. Ce sont des œuvres d'art dont les thèmes complexes pourraient être simples et elles seraient toujours classées comme de l'art. (parce que leur complexité stylistique existerait toujours).

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Nous nous occupions uniquement de l’art personnel, tout au long de nos analyses.

Voici une idée caricaturant la proportion d’art présent dans le monde si l’on inclue l’art mainstream.

Si tout l'art existant représente 100%,

-L'Art personnel tend vers les : 3%.

-L'Art Mainstream: 97%.

Au sein de l'art personnel,

-L'Art TC : 1%

-L'Art SC : 99% (qui peut contenir de l'art abstrait)

Au sein de l'art Mainstream,

-Il y a principalement de l'art SC : environ 99,98+%, - dont certains sont de l'art abstrait ou pas.

-Il y a de l'art qui n'est pas complexe à réaliser (comme une banane collée sur un mur). Cela ne serait pas classé comme de l'art dans la définition vue au point 1, mais parce que la réalité le considère comme de l'art, c'est de l'art.

Mot de fin: Il n’existe pas de TC Art dans l’art Mainstream.